2015-01-24

Une monnaie universelle



L’Enn

En 1995, lorsque j’écrivis les Pionniers de Hôdo j’imaginais une monnaie de science-fiction.

Comme toute fiction, il s’agissait d’un artefact adapté à l’univers que je créais, mais en même temps, comme « science-fiction » cet artefact était construit à partir de ma propre culture de scientifique, de physicien.

Cela me poussait à trouver un système à la fois rigoureux et mesurable de manière fiable, c’est-à-dire d’avoir une référence universelle, comme la vitesse de la lumière, l’oscillation d’un atome, la caractéristique d’une particule...

Or le physicien est quelqu’un qui pense toujours aux énergies échangées dans tout type de transformations. Une monnaie basée sur l’énergie me semblait un bon outil dans mon univers.

En même temps, Hôdo était trop peu peuplée au départ, ainsi sur cette planète, il n’était pas possible d’établir une monnaie. D’ailleurs, pourquoi ? Quel est le vrai sens de cet « outil » pour l’être physique, biologique et intelligent que nous sommes ? En tant qu’êtres physiques, nous n’existons que par l’énergie et la matière qui nous constituent. En tant qu’êtres biologiques, nous avons le besoin de vivre et de sur-vivre, c’est-à-dire de prolonger notre existence pour la procréation ou la pérennité de l’espèce. L’intelligence vient renforcer ces derniers points en nous apprenant à éviter de nous comporter en prédateur afin de conserver notre domaine (d’où la notion de domination). Vivre en bonne intelligence nous conduit de gré ou de force souvent à échanger, et l’humanité a essayé de représenter cet échange dans des modèles, au sens du moule. Les modèles économique et fiduciaire en sont.

Quand j’imaginai mon système, j’étais loin d’imaginer que les modèles économiques de nos sociétés nécessitaient un sérieux dépoussiérage si l’on voulait éviter des effondrements écologiques et l’explosion incontrôlée des sociétés.

J’avais baptisé cette monnaie « enn » pour plusieurs raisons :

— la plupart des langues du monde commencent le mot « énergie » par le son « enn » ;

— le son « enn » est précisément la prononciation en japonais du Yen.

J’avais même imaginé un symbole pour l’Enn, rappelant les doubles barres comme on le retrouve dans € ou dans ¥, et je lui avais trouvé un caractère Tifinagh, ⵐ, incluant aussi le son N.

Une monnaie énergétique

Lorsque les mesures furent étalonnées, il y eut, paraît-il, un rejet des commerçants. Utiliser des poids, des longueurs, des volumes « normalisés » les laissait perplexes. J’imagine qu’il en sera de même avec la monnaie qui pourtant fut à son origine « étalonnée ». L’or a souvent servi de modèle, et ce n’est d’ailleurs pas le seul « étalon ». Par exemple dans la province du Shaba dans la République Démocratique du Congo, la « croisette » était aussi une monnaie « normalisée », mais sur le cuivre.

La monnaie ne représentait pas, comme le kilo, la livre, le mètre, la coudée, la seconde... des unités physiques. Il n’y eut donc pas le même désir de normalisation et de précision. Elle ne représentait qu’une vague notion « d’effort » d’obtention, quelle qu’en soit la cause : travail, rareté... et appropriation !

L’appropriation est le véritable vecteur économique, car, plus que la rareté d’un objet, c’est l’envie de s’en approprier qui monte les enchères. C’est la fameuse loi de « l’offre et de la demande ». Cette loi, ne s’accommode pas de « normes », comme sans doute à l’origine les commerçants qui préférait utiliser leur « coudée », ou ceux qui ne voyaient pas l’utilité d’inventer le thermomètre, considérant que leurs sens suffisaient pour évaluer la chaleur et le froid.

Pourtant, tout est énergie et tout travail obéit aux lois de la thermodynamique notamment celle concernant l’entropie.

Quels seraient les avantages d’une telle monnaie ? C’est ce que nous allons développer.

L’indépendance géopolitique

En tout premier lieu, une telle monnaie aurait l’avantage de la neutralité géopolitique. L’énergie est identique et identiquement mesurée sur toute la planète, quel que soit les peuples qui occupent les « découpes » territoriales et quelle que soient les alliances économiques.

Cela permettrait de ne plus soumettre des populations à des dévaluations nationales, choses qui devraient être considérées comme un acte ségrégationniste, car derrière la dévaluation, se cache la dépréciation du travail humain des régions concernées. C’est d’autant plus grave que l’on sait combien le « salaire » est une marque de reconnaissance. Or voir son pouvoir d’achat diminuer correspond à une sanction, d’autant plus injuste qu’elle est décidée par des puissants qui décident de la valeur à attribuer à une monnaie locale et indirectement à des humains.

Le travail humain

L’humain, comme tout être vivant, est du point de vue purement de la physique, une « machine » qui travaille en transformant les énergies au sein desquelles il est plongé.

Or vivre implique déjà en soi un travail.

(Extraits de Wikipédia) Le métabolisme est soumis aux principes de la thermodynamique, qui régissent les échanges de chaleur et de travail. Le deuxième principe de la thermodynamique indique que, dans tout système fermé, l’entropie (c’est-à-dire le désordre) tend à augmenter. […] la vie n’est cependant possible que parce que tous les organismes sont des systèmes ouverts, qui échangent matière et énergie avec leur environnement. [...]

Le métabolisme de base (MB), ou métabolisme basal, correspond aux besoins énergétiques « incompressibles » de l’organisme, c’est-à-dire la dépense d’énergie minimum quotidienne permettant à l’organisme de survivre ; au repos, l’organisme consomme de l’énergie pour maintenir en activité ses fonctions (cœur, cerveau, respiration, digestion, maintien de la température du corps), avec des réactions biochimiques [...]

À cette dépense énergétique de repos, on peut signaler deux autres types de métabolismes:

Métabolisme postprandial : dépense calorique consécutive à un repas...

Métabolisme de l’exercice : dépense calorique consécutive à un effort physique ou au cerveau pendant un travail intellectuel ou de concentration intense (examens, conduite automobile...). Ce besoin est difficilement quantifiable étant donné qu’il varie d’un individu à l’autre et d’une situation à l’autre.

Dans tous les cas de figure, la « machine » humaine consomme de l’énergie. Son intelligence primaire d’être vivant consistera à trouver de l’énergie consommable, pour maintenir son existence et la prolonger. Une intelligence plus « évoluée » cherchera à améliorer le rendement de cette quête et de l’emploi des ressources qui toutes, en fin de compte, sont les fruits d’échanges énergétiques.

Par extension, tout « commerce » de l’homme avec son environnement, et donc l’humanité elle-même, est énergétique. Une monnaie permettant de mesurer cet échange sur une base énergétique pourrait au moins par exemple assurer le « minimum vital » que requiert son existence. Si un SMIC, un RSA, une pension de retraite devaient exister, elle devrait au moins représenter le métabolisme minimum de l’humain. Par métabolisme minimum, nous entendons le métabolisme de base auquel s’ajouteraient ceux qui s’imposent pour un minimum d’activité sociale et sécuritaire. Si notre société ne permet plus de profiter spontanément des dons de la nature (énergie, abri), il peut paraître logique que la « société » compense cette perte individuelle, qu’elle-même a bénéficié.

Encore une fois, cette mesure, même s’il est peu dépendre des climats et autres facteurs géologiques serait indépendant de la géopolitique proprement dite. Le métabolisme d’un bébé pygmée ou celui d’un vieillard inuit ne dépend d’aucune considération financière.

Les dépenses énergétiques de production

L’intérêt d’une monnaie basée sur la notion d’énergie est qu’elle est propice à représenter le véritable travail fourni lors de la production de biens (de « consommation » ou non).

La fabrication d’un objet est une succession de travaux ayant un prix énergétique : extraction de matières premières, affinage, alliage, mises en forme... jusqu’à son usage final. Et ensuite, le recyclage procède presque de la même manière, sauf que cette fois, le « minerai » n’est pas extrait du sol, mais récupéré des « déchets ». Il faut noter que la notion de recyclage occulte souvent le fait qu’il y a malgré tout consommation d’énergie. Ce qui est souvent tu comme s’il s’agissait d’un mensonge par omission pour « rassurer » les âmes candides et bien pensantes quant à l’écologie.

Dans tous les cas, il faut introduire les déplacements fournis, et, enfin, additionner toutes les activités humaines dédiées à ces actions.

Le rendement

Le rendement au sens de la physique serait directement récompensé. En effet, toute créativité permettant de produire à moindre coût énergétique serait automatiquement répercutée par une monnaie énergétique. Un tel système inciterait à réduire les dépenses de production et à produire plus à moindre coût. Il ne faut pas confondre ce rendement au sens de la physique de celui du travail qui a une notion de productivité dans le temps, ce qui s’apparenterait plus à un calcul de puissance (toujours au sens de la physique, c’est-à-dire de travailler plus vite).

Dans un mode de fonctionnement écologique, le slogan ne devrait pas se résumer à travailler plus pour gagner plus, mais aussi et surtout travailler mieux pour dépenser moins.

Les coûts des cycles de vie

Les coûts des différentes phases d’un produit, création, perfectionnement, maintenance, recyclage... seraient aussi mesurés avec précision, ce qui permettrait d’évaluer l’intérêt à choisir certaines orientations plus sages, même l’abandon d’un projet qui s’avérerait plus couteux que la création d’un nouveau.

Il n’y aurait pas ainsi de mode « écologique » pouvant se développer autour de concepts omettant certaines « dépenses ». Ainsi les recyclages de matières seraient peut-être vus sous un autre angle qui n’aurait d’autre but que rassurer la consommation en oubliant par exemple systématiquement le prix de la production et du stockage de l’électricité lorsqu’on vante une innocuité écologique.

Les valeurs intrinsèques

Deux sortes d’énergies « intrinsèques » : le prix de la matière elle-même et celui de la vie.

On parle souvent du prix de la rareté de certains matériaux. Il est toujours spéculatif et pourtant lui aussi peut être quantifié de manière rigoureusement scientifique, même au niveau de sa structure nucléaire. Plus un noyau a coûté énergétiquement cher pour exister, plus il est rare.

Quant aux réactions physico-chimiques qui ont conduit à l’existence de certains éléments simples (atomes) ou complexes (molécules...), cela aussi peut être mesurable.

De même, le métabolisme pourrait être une base pour mesurer le revenu minimum et salarial d’un individu, de même on pourrait utiliser une méthode analogue pour mesurer le prix des produits agricoles. Ainsi, un animal se nourrissant de végétaux est une chaîne de transformation énergétique.

Ces valeurs intrinsèques pourraient déterminer le coût écologique des matières premières et agricoles.

Mais, ces valeurs intrinsèques ne seraient pas reversées à un quelconque propriétaire. Elle devrait l’être à un fond commun planétaire permettant de gérer le renouvellement des ressources.

Dans un tel raisonnement, personne ne serait donc propriétaire d’un quelconque sous-sol ni être vivant, et à fortiori humain. Seul le travail pour gérer ses différentes ressources : richesses minières, aquatiques, sols cultivés ou non, cheptel, animaux domestiques, associés salariés ou non...

Par contre, dans la gestion, intervient la notion d’abri, à nos yeux, indispensable pour tout être vivant. Il s’en suit que l’entretien d’un espace sécurisé aussi pour se reposer, s’approvisionner ou travailler a un coût énergétique, donc redevable.

La « manne du ciel ».

Des échanges circulaires

La notion d’aides de solidarité est aussi à revoir sous la lumière de la monnaie énergétique.

En effet, au lieu de se perdre en calculs complexes et à force injustes, car incontrôlable, il serait préférable de donner à chaque humain une sorte de droit à la vie depuis la naissance jusqu’à la mort. De l’énergie, nous en recevons à chaque instant notre part donnée essentiellement, directement ou indirectement, par le Soleil et la gravitation, et cela bien avant la notion de monnaie et de finance, à l’instar de tous les êtres vivants et de toute l’humanité qui a précédé nos « grandes » civilisations, sans omettre celles du commerce, du grand capital et de la course à la consommation. Il est évident que cela ne fera pas disparaître les besoins d’assistance, car personne n’est à l’abri d’incident, mais cela améliorerait les flux d’échanges tellement opacifiés par l’absence de mesures fiables. Presque personne ne peut réaliser les impacts et les illogismes des aides passant par les contributions, les taxes, et les aides...

Par exemple, personne ne semble vouloir faire comprendre que les systèmes de retraite sont « illogique ». En effet, sans rentrer dans les détails des besoins différents liés à l’âge, prévoir pour ses vieux jours se résumerait à laisser une part de son « reste à vivre » d’aujourd’hui pour demain. C’est en réalité une somme colossale... combien peuvent la payer ? Autrement dit, et crument dit, cette somme manquante n’est apportée que par le décès prématuré de cotisants. Et là, on arrive à la quadrature du cercle, puisque l’on veut prolonger la vie même au-delà de la souffrance et de la conscience, et à quel prix énergétiques !

Et si l’on regardait tous les flux, les plus banaux, par exemple celui que le boulanger va payer à l’État qui en donne une partie à l’armée qui paye l’entreprise travaillant pour elle, laquelle verse le salaire de l’ingénieur qui va acheter son pain chez le boulanger... Combien d’échanges sont finalement d’une manière ou d’une autre « circulaires » ? Ce qui a été donné d’une main est repris par l’autre. Cette vision devrait mettre en question la notion d’imposition, de taxe, etc. De manière caricaturale, on pourrait dire que le boulanger a donné de l’argent à l’ingénieur pour qu’il se nourrisse chez lui à condition que ce dernier ait contribué à l’armement de son pays. Était-ce vraiment ce qu’il voulait ?

Le flux de la consommation, de même que les capitalisations, du point de vue énergétique sont bien des réalités sans valeurs ni politiques ni morales. Les analyser sous cet angle peut nous conduire à d’autres concepts économiques.

Survie et confort

Ce droit à la vie pourrait correspondre à subvenir à un « métabolisme minimum ». La manne du ciel devrait faire disparaître toutes ces notions d’aide récurente, puisque tout le monde les recevrait. Ce serait une sorte de « don » à la vie depuis la naissance jusqu’à la mort, planétaire et identique, pour tous. Un « don » et non un « droit », car nous n’avons aucun droit sur l’Univers.

Et certains se feront dépouiller ? Hélas, sans doute, mais ce ne sera pas à cause de l’économie énergétique. De toute manière, cette manne étant permanente, l’individu sera rapidement naturellement renfloué.

Par contre, cette manne du ciel servirait essentiellement à la survie de l’individu en milieu urbain, compensant l’absence de nature pour se nourrir et s’abriter. Mais n’est-ce pas le cas déjà actuellement pour une très large majorité ? Une grande partie de l’énergie est consommée dans ce but : il suffit pour beaucoup de gens de comparer ses revenus avec ceux du logement de l’alimentation. De manière primitive, cela se résumerait à la chasse et au maintien d’un environnement sécuritaire.

L’excédent énergétique par rapport au besoin minimum servirait alors à améliorer son bien-être. D’où l’importance du rendement !

Capital et synergie

L’imposition ne devrait servir qu’à maintenir les structures partagées par des communautés, et non à maintenir une fausse redistribution qui est en réalité purement politique et donc subjective.

Peut-être aussi serait-il temps de changer complètement la vision du crédit. Aucun système physique ou biologique ne vit à crédit.

Jusqu’à présent, aucun physicien n’a démontré que l’on pouvait créer de l’énergie. Le capital est incontournable en physique, c’est l’énergie potentielle de tout objet physique.

L’emprunt n’existe pas en biologie : un être vivant ne peut jamais consommer plus que ce qu’il a, sinon, il meurt.

La rémunération

La gestion d’une économie basée sur l’énergie devrait mener à reconsidérer le travail fait en commun : le salaire ne servirait plus à faire vivre quelqu’un, mais à gratifier l’apport fourni par le travail.

Or comme nous le disions, le travail consiste souvent à donner quelque chose qui a été récolté de notre monde puis transformé en « consommant » de l’énergie, qu’il s’agisse de chose vivante comme les végétaux, les animaux, le sous-produit... ou d’objet assemblé de matériaux, extraits, raffinés... Les énergies fondamentales n’appartiennent en soi à personne. Ce qui s’achète et se vend serait uniquement le travail de chacun, non celui des autres ou celui fourni par la nature et par les machines. C’est le travail exécuté par l’organisme qui a besoin d’être « rémunéré », non celui qui a été brûlé par autre chose.

Mais si ce travail a été effectué par d’autres êtres humains, ce sont ces autres humains qui ont besoin d’être rétribués. Nous pouvons alors paraphraser dès lors la fameuse phrase « à travail égal, salaire égal » en « à énergies consommées égales, rétributions égales ».

Paresse

Et si tout le monde reçoit une « manne du ciel », est-ce que cela ne serait pas propice à la paresse ?

Tout d’abord, il faut s’entendre sur la notion de « paresse » qui peut être une maladie, une forme d’abus, une marque d’intelligence...

Toute maladie mérite sa manne, car l’énergie solaire ou gravitationnelle ne fait aucune discrimination sur l’état de santé physique ou psychique des bénéficiaires.

D’un autre côté, il faut se souvenir que l’intelligence pousse à inventer le travail pour précisément moins travailler. C’est pourquoi on crée des machines. L’intelligence consiste à prévoir le meilleur rendement parmi les choix possibles pour gagner plus de ressources tout en diminuant la fatigue, ou plus précisément, en souffrant le moins possible. Il y a donc une tendance naturelle, saine et logique à « paresser ».

Le véritable « socialisme » serait de réduire le temps de travail et surtout de pénibilité pour tous sans vouloir se substituer à la nature !

Écologie

Une telle conception de vie serait déjà beaucoup plus écologique que toutes les autres attitudes parfois plus liées à des modes politicienne récupérés par le génie de la consommation. Maîtriser l’énergie de bout en bout devrait être un « idéal » écologique. Les espèces rares et surtout couteuses à produire doivent être protégées par le biais d’une monnaie liée à l’énergie.

On ne peut vivre pour la consommation alimentée par la production, cela a un coût énergétique que personne ne relève. C’est là qu’est la dépense de la planète. Il faut donc fabriquer pour durer, ce qui est diamétralement opposé à l’esprit de la consommation.

Plus loin encore !

Proche de l’utopie, peut-être, mais si l’on parle d’une manne du ciel, pourquoi ne pas suggérer aussi la manne de la terre ? La terre n’appartient en soi à personne. C’est ce qu’on en fait qui gagne de la valeur en fonction de l’énergie qu’on y a consacrée. Une terre agraire ne gagne de valeur que par le travail de l’agriculteur, les ressources minières ne gagnent que parce qu’elles ont été extraites... L’espace physique n’a de valeur que parce qu’il est protégé d’une manière ou d’une autre contre les intempéries ou contre les invasions de toutes espèces. Peut-être qu’un jour, la Terre sera considérée comme équipartageable, de la naissance à la mort, comme dans la légende de Hôdo : un lopin pour soi, un lopin pour la vie de la communauté et un lopin intouchable pour la Terre elle-même. Il y a là une véritable révolution de mentalité qui risque de ne pas plaire à beaucoup de monde. Et pourtant...

Un exemple :

Un paysan produit du blé. Pour simplifier le raisonnement de l’exemple, on omet qu’il a fallu au préalable avoir des semences et travaillé la terre... Mais ici, nous nous contentons de « cueillir » le blé à la main. Il y aurait alors deux lots d’énergies pour représenter le travail de l’agriculteur : l’énergie du blé en soi et celle de son activité. Mais ce blé n’est pas exploitable directement, il faut le transporter au moulin, ce qui va ajouter deux paires de lots d’énergie sans rentrer dans les détails : le travail transporteur et l’énergie du moyen de transport, puis le travail du meunier et celui du moulin. Ce blé devra être transformé pour être propre à la consommation, d’où deux autres paires de lots : le travail transporteur suivant et l’énergie du moyen de transport, puis le travail du boulanger et l’énergie du four. On peut même imaginer que ce pain va être vendu en grande surface, d’où une nouvelle collection de paires d’énergies : transporteur-transport, magasinier-stockage... La personne qui viendra acheter ce pain devra payer au prorata les différentes énergies consommées. Là aussi, il y a deux lots : l’énergie des travailleurs, et celles des machines qui se sont usées, des carburants brûlés, de la terre qui s’est appauvrie...

Le premier lot devra rétribuer le travail humain et le second assurer la maintenance des machines et de la plus importante de toutes : la Terre. Ce dernier lot serait géré par une sorte de Banque Écologique Mondiale.

Avec ce petit exemple, on veut montrer la notion de double type de dépenses : celles effectuées par l’homme, et celles engendrées par les outils, les végétaux... qui eux-mêmes requièrent soins et alimentation, c’est-à-dire de nouveaux apports de matière et d’énergie.

On se rend bien compte avec toutes les omissions qui ont été faites pour la facilité de la démonstration que l’application d’une telle économie basée sur l’énergie ne serait pas « juste » instantanément et que de toute manière il faudra toujours par la suite des réajustements pour tenir compte de tel ou tel flux d’énergie oublié ou mal évalué dans les mesures précédentes.

Mais on voit ici l’écart entre nos systèmes actuels. Il n’y a pas d’enrichissement possible par le travail ! En effet, la rétribution correspond à la perte d’énergie du travailleur. Par contre, il y a appauvrissement de celui qui ne dépend que du travail des autres, car pour vivre, il a besoin de faire appel à leur service ou de vivre en complète autarcie.

En effet, si le producteur a dépensé 20ⵐ d’énergie personnelle et 20ⵐ d’énergie non personnelle (autres hommes, machine, matière première...), le consommateur devra lui payer 40ⵐ, donc en fin de transaction, le consommateur aura perdu 40ⵐ et le producteur seulement 20ⵐ.

Plus les dépenses seront élevées, plus l’acquéreur se tournera vers un système plus économique, donc avec un meilleur rendement. Un travailleur qui produirait trop cher par manque d’optimisation à rapport de qualité égal, se verrait pénalisé comme dans les systèmes actuels de concurrence.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire