2010-08-22

L'ange et la bête

Nous ne savons pas quelle est la part de l'ange qui nous habite. Certains pensent que cette part est nulle, d'autres croient qu'elle est plus ou moins importante, plus ou moins imprégnée dans l'être vivant que nous sommes. Mais beaucoup espèrent que nous ne soyons pas que des bêtes. Cette question effarante pour la majorité des humains trouve réponse dans tous les courants philosophiques et religieux de la planète. Souvent, cette réponse est cristallisée très tôt dans l'enfance et peu nombreux sont en fait ceux qui choisissent leur réponse.
Le problème n'est pas la réponse que l'on a choisie, car personne ne peut affirmer qu'il détient la Vérité dans un domaine qui ne contient en fait aucun mot pour le décrire. Le problème est que, justement, cette absence de concrétisation permet de cacher la bête, non pas qui sommeille en nous, mais que nous sommes réellement. « L'homme entretient de lui une fausse idée qui sous la pelure avantageuse de beaux sentiments et de grandes idées, maintiennent férocement les dominances. La seule façon d'arracher ces défroques mensongères est d'en démonter les mécanismes et d'en généraliser la connaissance. (Introduction à la Nouvelle grille de H. Laborit.) »
Car ce sont avec de belles phrases que les peuples s'affrontent : « Qu'un sang impur abreuve nos sillons ! ». « Impur », le mot qui diabolise ceux d'en face, car nous sommes les bons ! Avec un bon dieu, avec une bonne interprétation de ses lois, avec une bonne morale, avec une bonne démocratie, avec une bonne politique... Avec un bel uniforme et de belles armes que ceux qui nous poussent au combat tout en nous bénissant ne porteront jamais.
Il n'y a qu'un remède pour désamorcer la passion des guerres de Vérité. Être humble dans sa foi : faire grandir en soi son ange n'implique pas qu'il faille devenir un ange exterminateur. « Reconnaître ce que nous sommes », Bouddha n'était sans doute pas le premier à le dire, de même que Socrate n'est pas le dernier. Des chamans amérindiens aux psychanalystes freudiens, nombreux sont d'avis que cette « reconnaissance » nous fera peut-être peur. Pourtant, c'est la nature, ni bonne, ni mauvaise. Une telle peur peut-elle justifier de mériter l'enfer ? d'y envoyer les autres ? ses enfants ?

2010-08-14

Travail

Un article de Livingstone.

Au travail !
Le travail, tour à tour, devoir, droit, placement ou mérite selon le courant sociopolitique dominant.


Pourtant, dès l'instant où l'homme vit, son corps travaille, même au repos. Et l'homme a beau être un animal évolué, il est avant cela, matière et énergie. Avant d'appartenir à l'ordre des primates, et sans préjuger de la notion d'esprit qui l'animerait, l'humain existe physiquement dans un univers qui lui impose ses lois.
Pour réaliser une transformation, c'est-à-dire un travail en physique, il faut au préalable disposer d'un « capital », d'énergies potentielles disponibles. L'être vivant, en perpétuelle transformation, a cette faculté de rechercher et d'emmagasiner ces énergies potentielles. Mais cette recherche d'énergie ne doit pas coûter plus que son utilisation. Aussi, l'être vivant est-il un être intelligent, sachant optimiser le rendement de la capture d'énergie pour vivre (mieux). Ce qui fera dire à Henri Laborit : « Le cerveau, ça ne sert pas à penser, mais à agir. »
Si travailler est dans notre nature même, et dominer est dans notre stratégie, il n'est pas étonnant que l'homme use de son intelligence pour exploiter l'homme. Le capital, notion physique neutre en soi, sous l'optique du capitalisme débouche sur la production de biens consommables et la boulimie induite forçant à consommer toujours plus des biens de plus en plus rapidement éphémères. L'intelligence devait permettre de rentabiliser le travail en créant des outils et des procédures appropriées et il semblait logique que ce fût pour dépenser moins d'énergie lors de son accumulation. Mais les dominants, capitalistes ou non, s'arrangent pour que cet enrichissement leur revienne en premier lieu.
S'il est vrai que le travail collectif permet plus que le travail d'une seule personne, il est vrai aussi que beaucoup de dominants profitent du besoin de coordination pour se comporter en bienveillants proxénètes protecteurs. Ainsi, il se crée des classes de « travailleurs » et de dirigeants entre lesquels une nuée de petits chefs-ludions se battent. Parmi ces derniers certains savent exploiter le mécontentement de la base et profiter des luttes de classes pour inverser des tendances, en leur faveur, pas celle de la base, même si cela fait partie du « marché ».
Laborit en dira : « La notion de classe, malgré les réalités qu'elle contient, détourne l'attention du problème fondamental de la destinée humaine. L'essence de l'homme est-elle le travail qui débouche sur la production de biens consommables, ou la connaissance ? Si l'essence de l'homme est la connaissance, l'évolution est ouverte en grand, infiniment. Si c'est le travail, l'évolution est prête pour les crises, les dominations économiques et les guerres, quelles que soient les idéologies dominantes ».
Car c'est bien là qu'est le problème : il ne s'agit pas de faire de révolution pour changer la distribution des rôles et des ressources, mais pour savoir quel est le vrai travail de l'homme.
Ce basant sur les concepts de cybernétique, Laborit ira même jusqu'à énoncer : « Il n'est pas utopique d'affirmer que l'Humanité ne peut continuer à toujours faire plus de marchandises pour augmenter un profit dont le but essentiel est de faire encore plus de marchandises : régulation en tendance dont on peut prévoir que le pompage n'est pas loin ». Il avait anticipé les surprimes et la crise financière de 2008 !
L'intelligence devrait conduire pourtant à une diminution de fatigue, c'est-à-dire à une diminution de travail en vue de capitaliser les énergies et matériaux indispensables à notre vie avec un certain confort. Alors, pourquoi le stress est-il croissant dans nos sociétés « exemplaires »? À qui sert le travail?

2010-08-06

Société de l'information

Un article de Livingstone.

L'homme n'est pas le seul animal à communiquer. En fait, on peut supposer que tous les animaux vivants en « société » s'échangent des informations. Mais, jusqu'à preuve du contraire, c'est chez l'homme que se trouve le plus grand besoin de communiquer comme si le message technique « danger, nourriture... » était insuffisant pour libérer le néocortex emprisonné dans sa boîte. La communication est le seul lien entre notre imagination et la réalité. Ce que nos sens ont capté, ce que nos neurones ont classé, ce que notre imagination a vécu de l'intérieur le monde extérieur, tout cela est une expérience unique. Un vécu tellement unique, que l'homme qui se penche sur son existence se sent bien seul dans cet univers. Cette « réflexion » consciente est peut-être ce qui rend notre espèce différente des autres. On peut estimer qu'une part non négligeable de nos découvertes fondamentales procèdent souvent de la trilogie : « Qui suis-je ? D'où viens-je ? Où vais-je ? » Mystiques, voire maçonniques, ces trois questions ? Ne les retrouve-t-on pourtant pas déjà gravées dans les hiéroglyphes et ne sont-ce point là aujourd'hui des questions de biologistes, d'astronomes et de physiciens ? Notre imagination nous projette bien au-delà du « vécu ». Et, pas nécessairement dans le fantastique, ni dans les scénarios dont nous sommes le héros ! Notre imagination nous permet de voir ce que ni les microscopes, ni les télescopes ne nous dévoilent. Cette imagination fertile devient la source intarissable de l'information.
L'information est si capitale dans la vie de l'homme qu'elle est présente partout et fait l'objet d'études aussi diverses que la littérature, la gestion des bases de connaissances et des systèmes d'informations. L'information est analysée dans sa forme et son fond. Le plus extraordinaire, c'est que l'information débute dans nos gênes.
L'information est possible grâce au fait que la combinaison des forces antagonistes de la physique offre des points d'équilibre où les entités sont relativement stables. Ainsi, l'information peut-être mémorisée. Toutes ces forces de la nature permettent l'existence d'un nombre incalculable de molécules d'ADN présentes dans un nombre tout aussi gigantesque de cellules, voire virus, dont une infime proportion sont assemblées pour constituer des humains qui, au sommet de la complexité, engendrent des sociétés avec leurs traditions et leurs lois, somme d'informations toujours croissantes.
L'information est si prisée qu'avant les scribes, il y avait les conteurs qui donnèrent un nom aux objets jusqu'aux étoiles et même à l'invisible. L'information a son prix dans le commerce qui se partage tous les renseignements, qu'il s'agisse de ceux qui sont soutirés ou de ceux qui sont diffusés en masse par le multimédia. La communication, qui semble à certains comme un bien de l'humanité, est pour d'autres une stratégie pour accroître des monopoles de pensée uniformisée. Pour ces derniers, la masse croissante des exclus du savoir est tout profit. En effet, à part les délinquants qui dérangent, ajoutant parfois de l'eau au moulin de l'insécurité, les autres qui ont souvent honte de montrer leur ignorance sont aisément manipulables, grossissant ainsi la masse des « servants ».
C'est justement ici qu'intervient le pari de ce site : réunir ceux qui veulent détourner l'agressivité vers la volonté de construire, ceux qui veulent sublimer l'instinct de domination en maîtrise, ceux qui veulent partager leur savoir sans prosélytisme. Il ne s'agit pas de réunir, pour créer un parti, un mouvement ou toute autre association ayant un but « dominant ». Le projet Hôdo n'est pas une réunion de prétendues élites, paternalistes condescendants, distribuant avec parcimonie, non seulement leur savoir, mais aussi, et surtout, le moyen d'acquérir l'information, et d'en profiter.
Favoriser l'émergence d'une société de l'information, c'est aussi : Respecter toute intelligence ainsi que son support (première loi de la Charte de Hôdo) .

2010-08-01

« Errare humanum est, perseverare diabolicum »



« Il est humain de se tromper, persévérer est diabolique ».

Il serait judicieux d'appliquer cette sentence aux sociétés, quelle que soit leur taille, petites communautés, grandes nations...
Les sociétés, dès l'instant où elles alimentent leurs membres par des interrelations baignées dans un flux de prêt-à-penser, se comportent comme des entités autonomes où les individus perdent une bonne part de leur liberté de jugement et de leur choix de décision.
Il arrive néanmoins couramment que les victimes des erreurs des sociétés fixent leurs colères sur les membres de la société. Pourtant, si au cours d'un combat corps à corps, le blessé s'en prenait aux « cellules » de son adversaire, le raisonnement paraîtrait quelque peu étrange.
Les sociétés ont un « esprit » engendré, non seulement par leurs membres, mais aussi par l'interaction avec d'autres sociétés. Cet esprit qui correspond au meilleur choix du moment pour sa survie est souvent entretenu à la fois par les dominants qui en usent et abusent, et par la rétroalimentation des membres qui entretiennent le courant.
Les dominants seraient en quelque sorte des « tumeurs » du cerveau qui au lieu de se contenter de diriger l'organisme, se servirait de son pouvoir pour favoriser prioritairement leur propre bien-être.
Quant à la rétroalimentation des cellules, elles se justifient par le fait qu'elles ne sont pas au courant de la manière dont sont prises les décisions du cerveau. Elles sont censées faire confiance à l'organe directeur et donc propagent en toute « bonne foi » et sans contrôle l'information reçue qui est en général un schéma simplifié de concepts initiaux. Les cellules n'ont pas le droit de se révolter sinon elles sont expulsées de l'organisme quand elles ne sont pas tout simplement exterminées. Il en est de même pour les individus qui ne peuvent passer leur temps à critiquer toute information reçue. En temps normal, c'est-à-dire hors mutation, ils font confiance souvent aveuglément aux « sages » (religieux, philosophes, politiques, scientifiques, diplômés, doyens...) et à leurs « évangélistes » (prêcheurs, journalistes...).
Ces considérations permettraient peut-être à désenvenimer tous les livres d'histoire qui s'appesantissent sur les défaites et les invasions de tout type. Les sociétés commettent des erreurs quasiment comme des entités vivantes. À l'intérieur de celles-ci, la majorité qui n'est ni héroïque, ni martyre, ni crapule suit le courant qui les guide, persuadée d'avoir agi comme il le fallait.
Comme un être vivant, la société apprend, souvent de ses erreurs. Erreurs de jugement, erreurs de stratégie... Est-il « social » de se tromper ? Dans ce cas, par analogie, les erreurs de société, ne sont-elles pas « excusables » si elles se sont développées à l'ombre de l'ignorance et ne deviennent-elles pas condamnables si cette société persiste malgré tout à la lumière de la connaissance. La compréhension des comportements tant humains que sociaux devrait donc nous apprendre à mieux gérer les crises de l'Histoire, mais en entretenant le dépit, la revanche, la haine... l'humanité persiste à persévérer... diaboliquement.