2010-10-30

Point aveugle

معزة و لو طارت
ma3za walaw tarett
(dicton algérien signifiant : c'est une chèvre, même si elle vole)

Le point aveugle est une image dans le concept hôdon pour désigner l'impossibilité de voir certaines sources de nos pensées comme si, à l'instar de la rétine, des zones de conscience étaient aveugles. Il apparaît souvent que des convictions sont quasiment inébranlables face à une argumentation plus logique et cohérente que celles qui soutiennent ces convictions. Forcer à les voir peut être ressenti comme un « viol intellectuel » provoquant malaise et révolte.
Faut-il préserver ce point aveugle pour Respecter toute intelligence ainsi que son support (première loi de la Charte de Hôdo) ? Souvent, ces points aveugles doivent correspondre à des équilibres internes de la pensée au plus profond de l'être. Il peut s'agir de connaissances très tôt acquises, dans les premières années de la vie, et sur lesquelles va se construire toute la personnalité. Il peut s'agir de réponses qui permettent à la conscience d'accepter la vue de sa vie... Dans le premier cas, les défenses du cerveau peuvent être telles qu'il serait vain de prêcher quoi que ce soit qui aille à l'encontre des fondements de la conscience. Quant à la seconde, elle apparaît peut-être pour combler un « trou » qui, sinon, serait automatiquement « rempli d'angoisse ». A-t-on le droit de déstabiliser une personnalité ou de créer une angoisse, fût-elle existentielle ? D'autant que personne ne peut dire qui détient la Vérité, toute la Vérité. Il existe de nombreux points obscurs dans notre savoir, à moins que notre orgueilleux savoir ne soit au contraire que quelques lucioles égarées dans la nuit.
On parle de tolérance plus souvent concernant le comportement comme les traditions vestimentaires, mais rarement concernant les pensées proprement dites. Et là, il ne faut pas se contenter de n'y voir que conflits de religions ou de politiques, qui ne sont que des aspects les plus spectaculaires des divergences de la pensée humaine. Le rejet des idées d'autrui est bien plus fréquent et présent dans les moindres détails : des goûts et des couleurs...
Le problème des désaccords d'opinions c'est que cela touche peu ou prou la stabilité psychique d'une part personnelle et d'autre part collective. Il y a donc menace, risque d'inimitié, de rivalité et de conflits à l'échelle des individus ou des peuples. C'est pourquoi ces derniers favorisent les pensées collectives, lesquelles deviennent vite des prêt-à-penser, sorte de taques d'égouts pudiquement posées sur les reflux souterrains de la pensée.
Soyons humbles! nous avons tous nos points aveugles, alors évitons de forcer les autres à penser comme nous et acceptons les divergences tant qu'elles ne sont pas en contradiction avec un idéal minimum. Ces contradictions sont même une aubaine pour faire vivre la société humaine. Plutôt que l'affrontement, nous voulons, plus là qu'ailleurs, Respecter le droit à l'intimité et à l'évitement (deuxième loi de la Charte de Hôdo) .
Par contre, il faut sans relâche se défendre des dominants qui veulent propager leur vérité, car ceux-là essaient de profiter de nos points aveugles pour servir uniquement leurs desseins. Évitons leur protectionnisme parfois teinté de libéralisme !
Quant aux autres, la majorité, nous, certes dominants à son heure quand l'opportunité se présente, sachons cultiver et développer une nouvelle forme de vie ensemble sans recourir à des proxénètes de l'âme, sans prendre en otage les pensées d'autres humains, même s'ils ont réussi à exprimer mieux que nous certains concepts, et surtout ne soyons pas juge et bourreau avant même d'avoir été blessé.