2010-06-11

Gaïa, Pachamama, Terre mère... Terra !

Si nous étions à bord d'un vaisseau loin de toute terre ferme et sans savoir pour combien de temps, il semblerait idiot de le saccager. Les naufragés de la Méduse étaient capables de s'entretuer, non de couler leur radeau. Et pourtant, c'est ce que nous sommes capables de faire avec ce vaisseau qui vogue dans l'espace et que l'on nomme Terre.
Les anciens adoraient cette planète au point de la diviniser et de l'assimiler à la mère nourricière.
Mais aujourd'hui, son statut divin s'est effacé pour laisser place à celui d'objet appartenant au domaine public. Or, d'une part, les sociétés consuméristes et donc individualistes (deux individus séparés consomment plus) vantent le respect exacerbé de la propriété privée au détriment des ressources partagées. D'autre part, certains groupes ne participant pas aux partages normalisés des richesses considèrent les biens publics comme des « symboles » à détruire. L'un comme l'autre considère le bien public comme leur « bac à sable ». Malheureusement, la planète n'est pas un terrain de jeux et de tests où l'on peut tout effacer pour tout recommencer.
On peut prendre la fuite d'un Titanic, et survivre à la panique et au froid, mais même avec beaucoup de chance on ne peut pour l'instant quitter la Terre.
Combien de temps serons-nous en sécurité sur ce vaisseau qui nous emmène dans un voyage qui de toute manière aura une fin ? En attendant, de pouvoir créer d'éventuels canots de sauvetage, sachons éviter une fin prématurée du berceau de l'humanité.
Certains penseurs ont imaginé que la Terre serait une entité supérieure à l'humanité tout en n’étant point divinisée : c'est l'hypothèse Gaïa. Le concept n'est pas nécessairement bien accueilli (désaccords sur les arguments et leurs interprétations…), mais l'idée a ceci d'original qu'elle donne du poids à la synergie pour maintenir la Terre. Si l'objectif était de développer une « Gaïa » où toute l'humanité serait participante, alors peut-être que cette planète serait un Éden qui nous permettrait d'aller plus loin en avant vers l'infini...
L'idée serait peut-être d'apprendre partout sur Terre un « civisme planétaire » indépendant des traditions locales, et comme le sont les normes consensuelles techniques.
Mais comment peut-on respecter notre planète comme notre unique vaisseau à travers l'Espace et le Temps, si déjà nous ne sommes pas en mesure de respecter les transports en commun ?
Comment peut-on attendre le respect du bien commun tant que l'on considère que ce qui n'est pas possédé par quelqu'un n'appartient à personne ? Et tant que ce qui n'appartient à personne appartiendrait à l'occupant. Qu'importe si cet occupant est un voisin de palier quelque peu envahissant, un défricheur qui envahit un territoire dépourvu de clôtures ou un entrepreneur qui met en vente le sol de la Lune ou de Mars ! Qu'importe les armes et les arguments choisis pour annexer tout territoire : la guerre, l'argent, la politique, la religion et toutes les philosophies bien pensantes...
Plus insidieux, car plus discret, il y a l'abus des ressources communes en pensant que ce qui est partagé, ce sont les réparations. Partagées surtout par les autres !
User et abuser... Déjà, il est difficile de respecter celui que l'on voit en ouvrant sa porte, alors, pour l'anonyme, l'invisible, la Terre...
Comment faire comprendre que la détérioration coûte à tous, quand la publicité incite parfois à saccager, ne fût-ce que pour avoir le « bonheur » de laver plus propre ?
Détruire est inévitable, car inexorablement tout s'use, mais pourquoi accélérer le processus par esprit de « consommation », voire de vandalisme ? Quelle différence y a-t-il, tout compte fait dans les résultats ? Aucun si n'est dans l'esprit. Tout est question de « propreté » : consommer est plus propre qu'exprimer sa haine ! Consommer maintient la société que l'on connaît et adore puisque c'est elle qui nous permet de rêver qu'il est possible de consommer toujours plus, suprême bonheur des démocraties...
Mais tout n'est pas perdu ! Il y a le recyclage ! Invention moderne d'anciennes traditions qui se perpétuent chez les pauvres ne participant pas à la consommation.
Le recyclage, n'est-il pas devenu un leitmotiv autorisant la dégradation ? Pourquoi personne ne donne-t-il le prix énergétique du recyclage ? Car récupérer de la matière première requiert de l'énergie et parfois plus que celle de l'extraction, du raffinement et des divers traitements et transports de la matière. Par exemple, pour commencer à pouvoir retravailler le verre il faut au moins 550 °C. À cette température, les microbes sont éradiqués depuis longtemps : alors, en quoi le recyclage du verre est-il plus économique/écologique que la consigne (c'est à dire la récupération des récipients après lavage) ?
Faudra-t-il que notre planète berceau devienne planète tombeau pour en apprécier sa valeur ?